Article paru dans la Libre Belgique du 21 janvier.
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Texte intégral:
Près de 1 500 handicapés privés d’allocations.
Leur allocation d’insertion est désormais supprimée, sans qu’un autre revenu leur soit attribué.
Des centaines de personnes handicapées, 1 500 selon les estimations, vont se retrouver, dès ce mois de janvier, privées de tout revenu. L’information vient d’être annoncée au Conseil supérieur national des personnes handicapées (CSNPH). Et l’Office national de l’Emploi (Onem) la confirme. C’est une conséquence de la limitation à trois ans du droit aux allocations d’insertion (ex-allocations d’attente).
Pour rappel, le gouvernement Di Rupo et la ministre de l’Emploi Monica De Coninck (SP.A) en particulier, ont décidé que les allocations d’insertion, c’est-à-dire les allocations que l’on perçoit au terme de sa scolarité et d’un stage d’attente, et avant de décrocher un job, seraient désormais limitées à une durée de 36 mois.
Des personnes « sans capacité de gain »
Cette mesure est entrée en vigueur le 1er janvier 2012. Trois ans plus tard, les premières exclusions du chômage sont prononcées par l’Office national de l’Emploi (Onem). D’après la dernière estimation de l’Onem, près de 22 000 personnes, jeunes et moins jeunes, ne toucheront plus, dès ce mois de janvier, leur allocation d’insertion, dont le montant varie entre 260 et 1 100 euros, selon la situation.
Des exceptions ont cependant été prévues à la nouvelle réglementation. Une prolongation de deux ans pouvait être octroyée sous certaines conditions : d’une part, être actif dans sa recherche d’emploi; d’autre part, soit présenter des problèmes de nature médicale, mentale, psychique ou psychiatrique, soit être reconnu inapte à travailler à plus de 33 %. Et pour ceux qui, au 1er janvier, n’auraient pas encore obtenu leur prolongation de deux ans, un supplément de deux mois a été accordé, durant lesquels ils continueront à toucher leurs allocations d’insertion, et qui doit permettre de régler leur situation.
Ce délai doit également permettre au Service public fédéral (SPF) Sécurité sociale de faire transiter ces personnes vers le régime des allocations pour personnes handicapées, afin qu’elles ne se retrouvent pas sans revenu.
Mais la situation ne s’est pas arrangée pour tout le monde. Ceux que l’on appelle les « personnes sans capacité de gain », c’est-à-dire d’une part celles qui ont 15 points au moins sur l’échelle de handicap du SPF Sécurité sociale et d’autre part celles qui ont 12 points au moins et sont reconnues inaptes à travailler à plus de 66 %, semblent avoir été oubliées. Elles n’ont droit ni à la prolongation de deux ans, ni même à celle de deux mois, et se retrouvent dès lors sans ressource depuis le 1er janvier.
« C’est inhumain ! »
Du côté des organisations œuvrant en faveur des personnes handicapées, c’est la stupéfaction, d’autant qu’elles viennent d’apprendre la nouvelle. « Ce lundi, l’Onem l’a annoncée au CSNPH », explique Michel Magis, directeur de la Ligue Braille, association d’aide aux personnes malvoyantes et aveugles, dont certaines figurent parmi les victimes de cette mesure. « Nous sommes d’accord avec le principe que les personnes sans capacité de gain n’ont pas vocation à toucher le chômage mais plutôt une allocation pour personnes handicapées. Mais on ne peut pas le leur supprimer sans qu’un autre revenu ne soit prévu. Nous exigeons que l’Onem revienne sur cette décision, d’autant plus injuste que Mme De Coninck et l’Onem avaient garanti que ces personnes garderaient leur allocation tant qu’une alternative financière n’était pas trouvée. »
Le CSNPH va interpeller le nouveau gouvernement à ce sujet. Et le SPF Sécurité sociale a promis de traiter en urgence la situation de ces exclus du chômage. « Mais ils ne pourront pas immédiatement trouver une solution pour chacun, râle Michel Magis. Et des personnes handicapées vont donc se retrouver sans revenu pendant un ou plusieurs mois. C’est inacceptable ! Inhumain ! »
Par Laurent Gérard, 2 janvier 2015